L’analyse lexicale d’un texte tiré des lettres pauliniennes: pourquoi? Comment faire?
L’étude de l’articulation de la pensée de Paul peut mettre à rude épreuve la sagacité du lecteur ! Surtout dans les textes à caractère polémique (Rm 1 – 8) ou écrits avec passion (1 Co 1 – 4 ; 2 Co 1 – 7). Dans certains textes (Ga 3), Paul s’exprime à la manière des rabbins, dans une logique basée sur une interprétation des Écritures qui nous paraît simpliste et arbitraire et donc… inconsistante.
Le lecteur soucieux de comprendre la pensée de Paul doit donc s’initier aux différentes manières qu’il a d’articuler sa pensée.
Ici, nous présentons une méthode simple dans son principe mais minutieuse dans sa réalisation : l’analyse lexicale du texte. Cela concerne des sections de la longueur d’un chapitre ou plus (pas trop tout de même !). Elle est particulièrement valable et même indispensable pour l’étude des ch. 1 à 4 de la Première lettre aux Corinthiens et des sept premiers chapitres de la Deuxième lettre. Cette étape est incontournable sous peine d’en rester à des indications floues et arbitraires.
La méthode vise à noter très précisément le vocabulaire utilisé (noms, verbes, adjectifs, adverbes) et sa répartition dans l’ensemble de la section. On peut choisir de prendre en compte le fait que le texte contient des citations de l’Écriture.
On a auparavant défini les limites du texte à étudier grâce à un sondage rapide ou en reprenant les informations d’une étude à notre disposition. Par exemple, il est facile de constater que les ch. 1 à 4 de 1 Corinthiens vont ensemble et que les chapitres suivants (ch. 5 – 6) traitent de sujets complètement différents ; on peut donc se lancer dans l’étude de 1 Co 1 – 4 sans se préoccuper des chapitres qui suivent.
Évidemment il faut travailler sur le texte grec ou sur une traduction littérale rigoureuse.
Voici les étapes successives à suivre rigoureusement:
1- Imprimer le texte, sans le diviser en paragraphes (sauf les paragraphes majeurs faciles à repérer).
2- Indiquer par des couleurs spécifiques les termes appartenant au même champ lexical. Par exemple, pour 2 Co 1 – 7 : lettre, mort/vie, Esprit, gloire, voile, diaconie, intérieur/extérieur, réconciliation, connaissance… Prévoir jusqu’à 25 couleurs ou marques différentes !
3- Identifier les « acteurs » (pas au sens de l’analyse structurale) mentionnés explicitement par l’auteur : qui agit ? À qui s’adresse l’action ? De qui parle l’auteur ? Se met-il dans un groupe, dans le même groupe que les destinataires ?
4- Qualifier les « modes d’expression » : noter les interrogations rhétoriques (Ne pensez-vous pas que… ?) ; les ordres ou les interdits ; les formules d’exhortation ou d’interpellation ; les indications qui font appel à la réflexion, au raisonnement ou à l’observation.
5- Structurer le texte en paragraphes selon la fréquence de tel ou tel vocabulaire.
6- Chercher les correspondances existant entre ces paragraphes ;
* en dégageant une éventuelle composition de type « rhétorique » : p. ex. composition « concentrique » : un thème A est suivi d’un thème B, puis d’un thème C, suivi du thème B repris d’une manière différente (B’), enfin d’un thème A’ ; ce type de composition, courant dans les livres prophétiques et les Psaumes bibliques, est fréquent ;
* par le moyen des indications logiques présentes dans le récit : en premier lieu les conjonctions de coordination, notamment les causales, les consécutives ou les concessives
7-.Interpréter le résultat en fonction des grandes lignes de pensée qui ressortent de l’ensemble du texte. Cela est facilité si l’auteur a lui-même indiqué sa préoccupation et même l’idée principale qui va commander le reste. P. ex. les versets 17-18 du ch. 1 de 1 Corinthiens situent la suite dans un débat sur le ministère de Paul (opposition entre baptiser et prêcher) et le contenu de sa prédication (en rapport ou non avec la sagesse de la croix).